ÉDITORIAUX ACP PR

ACP Pratique et recherche n°21

Ceux qui ont l’expérience de séances de psychothérapie centrée sur la personne, que ce soit en tant que client ou en tant que thérapeute, ont souvent pu réaliser à quel point leur corps participait de la démarche. Cela se traduit de diverses manières, y compris par le sentiment d’avoir effectué, en une séance, un effort physique intense – accompagné d’ailleurs du fait d’avoir réellement transpiré. Si l’importance du non verbal dans la communication est généralement admise, la manière dont le corps participe de l’écoute a été fort peu décrite. Au moment de l’aborder, il semble que nous manquions de mots précis. Nous pouvons alors en être réduits, par exemple, à parler de « sentir en mode corporel-affectif » pour tenter de décrire le processus de perception dans son corps qui « fait partie intégrante de la relation du thérapeute avec un client » et « est répété encore et encore...

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ACP Pratique et recherche N°20

Remettre son pouvoir à la personne, considérer, en thérapie, que « c’est le client qui connaît son mal » (p. 46) est un des principaux bouleversements provenant de l’oeuvre de Rogers. Aujourd’hui encore, cette perspective est difficilement acceptée. Elle rejoint pourtant ce que disent bien des personnes qui sont passées par des états psychiques qualifiés de «patho -logiques ». À les lire, il y aurait beaucoup à gagner à écouter leurs témoignages et «un plus grand nombre de personnes devraient comprendre l’idée de rétablissement selon les usagers de ces services » (p. 30). Cette démarche demande de pouvoir se libérer d’un conditionnement social qui mène à considérer avant tout comme important ce que fait le thérapeute et à accorder une moindre place au client, ou patient. Ce faisant, la dimension relationnelle est également minimisée. Pourtant, «quand il n’existe pas de carences physiques […] » (p. 59), la dimension humaine soignante...

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ACP Pratique et recherche N°19

Il est étonnant, alors que les expressions « relation thérapeutique » et « relation d’aide » sont couramment utilisées dans les professions concernées, que relativement peu d’attention soit portée à la valeur, à la nature, à l’impact ou encore aux effets de la dimension humaine et relationnelle en psychothérapie. Dans les milieux de la recherche, par exemple, « la question critique pour la plupart des chercheurs de la relation thérapeutique est liée à l’adaptation de la relation thérapeutique à un individu» (p. 63). Dans une telle conception, la relation est prise comme factuelle, pragmatique, laissant bien peu de place à la nature à la fois interactive et unique de toute rencontre entre deux êtres humains, ainsi qu’à sa dynamique propre. Pourquoi une telle situation? Pourquoi la part humaine de la relation thérapeutique n’est-elle pas considérée d’office ? Par besoin de pouvoir et de contrôle ? Par peur de l’inconnu, de ce...

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ACP Pratique et recherche N°18

La psychothérapie centrée sur la personne et les différentes applications de l'Approche centrée sur la personne se caractérisent par plusieurs dimensions qui en composent l'identité profonde et la plupart du temps les différencient des conceptions les plus répandues. Ces dimensions cependant ne se comprennent pas prises isolément mais sont à considérer comme relevant d'un tout, duquel elles se réfèrent tout autant qu'elles le composent. Ainsi en est-il de la manière d'entrer en relation. Notre façon d'aborder un autre être humain dépend de notre regard sur lui, de notre considération ou déconsidération, de nos idées préconçues plus ou moins fortes, de notre but ainsi que bien sûr de notre état d'humeur. En Approche centrée sur la personne, la manière d'entrer en relation est dessinée d'une part par le choix assumé du regard positif inconditionnel et d'autre part par la volonté de laisser son plein pouvoir à la personne. "Cela signifie, dans le cadre...

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ACP Pratique et recherche N°17

La psychothérapie et la relation d’aide offrent des espaces privilégiés à la découverte du fonctionnement du psychisme humain. Cette exploration est d’autant plus porteuse de résultats que les personnes qui consultent sont souvent désireuses de trouver des réponses, par suite d’une nécessité de vie ou d’une exigence intérieure. Elles sont à la recherche de ce qui leur échappe et qui, par conséquent, les limite. Dans ce vaste champ de l’exploration et de la compréhension de soi, la thérapie centrée sur le client et l’Approche centrée sur la personne occupent une position particulière, dont les conséquences sont encore loin d’être toutes mises à jour. «Tout cela découle également du fait que, au fil de l’histoire de l’approche, la théorie s’est établie et s’est modifiée à la lumière de la pratique» (p. 27). Les constats faits dans le cadre de cette pratique proviennent ainsi de l’observation et ne sont pas le fruit...

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ACP Pratique et recherche N°16

Commencer une psychothérapie, c’est vraisemblablement aller au-devant de grands changements, pour soi et dans sa vie. Mais c’est en même temps rester soi, avec ses caractéristiques, ses qualités et ses défauts, sa « couleur » personnelle, ses points forts et ses points faibles. Changer ne veut pas dire devenir quelqu’un d’autre ni éliminer ce qui, en soi, ne nous convient pas. Cela veut dire devenir plus connaissant de soi-même, plus apte à franchir ses obstacles personnels. «Solutionner », dénouer ses blocages, ce n’est pas en éliminer les ingrédients premiers ; évoluer, c’est plutôt devenir capable de faire autre chose avec ce que nous sommes, en restant la même personne, en gardant le même tempérament. La question du changement s’applique également à la démarche en relation d’aide qu’est l’Approche centrée sur la personne. Les énoncés élaborés au milieu du siècle dernier sont-ils toujours valables ? Correspondent-ils encore à l’actualité ? Là aussi,...

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ACP Pratique et recherche N°15

Psychothérapie, thérapie familiale, accompagnement des personnes âgées, enseignement, est-il possible que des mêmes caractéristiques soient applicables pour les personnes engagées dans ces différentes pratiques professionnelles ? Poser la question, c’est ouvrir un vaste champ de réflexion sur la nature de la relation d’aide, des situations où une personne humaine a pour engagement d’en accompagner d’autres à « grandir », à aller de l’avant, à faire face au mieux aux défis de leur existence. Poser cette question, de plus, ce n’est pas y répondre ; c’est avant tout y réfléchir. Dans bien des domaines de notre vie sociale, « il existe un besoin urgent d’alternatives au modèle traditionnel » (p. 34). Contrairement à ce qu’une perception superficielle pourrait laisser penser, l’alternative proposée par l’Approche centrée sur la personne ne mène pas à un manque de rigueur et de cadre. Ce n’est pas une trop grande liberté qu’elle laisse à la personne. Son...

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ACP Pratique et recherche N°14

Il existe un certain nombre de débats récurrents au sein des praticiens de l’Approche centrée sur la personne. L’un porte sur Rogers et sur son évolution au cours de sa carrière professionnelle. Certains estiment qu’il s’est éloigné de sa théorie de base, dont les principaux écrits datent de la fin des années cinquante, d’autres au contraire qu’il est toujours resté fidèle à sa conception et à sa pratique initiales. Et si cette question, parfois passionnée, n’était au fond qu’un faux débat, du fait de la nature même de la démarche de Rogers ? En effet, l’approche de la relation d’aide qu’il a appliquée et décrite ne relève, par essence, pas d’une technique. C’est dès le départ une pratique que Rogers et ses étudiants ont observée, puis élaborée et formulée en termes théoriques. Or cette pratique relève de compétences et de qualités humaines avec lesquelles il n’est pas possible de faire semblant. Au...

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ACP Pratique et recherche N°13

La thérapie centrée sur le client et les nombreux travaux de recherches de Carl Rogers dans le domaine des relations humaines ont peu à peu abouti à une approche touchant à l’être humain en société, à ses rapports aux autres (d’ailleurs intimement liés à son rapport à lui-même), dans des contextes personnels aussi bien que collectifs. C’est ainsi que la démarche s’est élargie pour s’appliquer également à des groupes : groupes de rencontre tout d’abord, espaces dans lesquels, grâce à l’apport d’une écoute centrée sur la personne garantie par des « facilitateurs » formés, peut se développer la rencontre, à soi comme aux autres ; groupes interculturels ensuite, en application des mêmes principes à des contextes plus vastes touchant à la diversité humaine ; groupes à but thérapeutique enfin, dont la pratique semble relever d’une évolution encore en cours. « Historiquement et du point de vue du contenu, on peut...

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ACP Pratique et recherche N°12

La plupart des écoles de psychothérapie considèrent l’empathie comme étant l’un des fondements de toute démarche de relation d’aide. Elles divergent par contre quant à la place et l’importance qu’elles lui accordent. Dans la théorie et la pratique de l’Approche centrée sur la personne, l’écoute empathique est, avec la congruence et le regard positif inconditionnel, l’une des trois conditions à remplir de la part de l’écoutant. Ces trois dimensions interagissent et forment un tout qui déterminera la qualité de l’accompagnement thérapeutique ou de la relation d’aide. Elles sont considérées comme suffisantes et toute autre attitude ou méthode du praticien risquera d’être nuisible à la progression du client. Il fallut des années de pratique, de réflexion et d’étude à Carl Rogers pour parvenir à définir les fondements de sa démarche en relation d’aide. Il n’a pour autant pas toujours été compris, et souvent déformé. Il a, surtout, développé une conception qui ne...

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ACP Pratique et recherche N°11

Dans le cadre d’une relation d’aide, qu’est-ce qui fait que quelqu’un change ? La réponse, selon la démarche centrée sur la personne, a trait au potentiel de croissance de l’être humain, et est de ce fait inhérente à la personne. Ce n’est pas, selon cette conception, par un apport extérieur de connaissance que se produira le changement : il n’y a pas de connaissances supérieures, dont certains seraient dotés – les professionnels – et d’autres pas – les patients, les clients, les résidents. Cette position reste minoritaire, bouleversant les habitudes, idées et conceptions les plus répandues dans les métiers de l’humain. Elle met la valeur humaine au centre, considère comme premiers et prioritaires le contact et la qualité de la relation. Elle intègre dans ses fondements que « les ‹relations› sont considérées par les êtres humains comme la principale source de sens » (p. 48). Elle demande de se former et...

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ACP Pratique et recherche N°10

La démarche développée par Carl Rogers est empreinte de cohérence et de simplicité, tant dans sa pratique, quel que soit le domaine d’application, que dans ses dimensions théorique et philosophique. Elle concerne l’humain et de ce fait renvoie chacun à sa réalité, avec ses acquis, ses limites et sa complexité. Elle pose cependant une exigence sur l’individu, celle de ne pas être enfermé en soi-même, dans ses conceptions, ses pensées, ses impressions. Elle l’invite plutôt à une ouverture au monde et aux autres, à participer à une réalité toujours en mouvement et à s’y adapter constamment. Elle est une discipline en même temps qu’une « attitude qui rend humble devant le mystère des autres et qui fait que l’on souhaite seulement les reconnaître et les respecter » (p. 23). Pour être simple, cette attitude n’est pas pour autant synonyme de facilité. Elle ne ménage pas la part d’orgueil et d’égocentrisme qui...

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